Le droit de l’énergie connaît une transformation majeure sous l’influence des politiques de transition énergétique et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Au cœur de cette mutation, l’audit énergétique s’impose comme un outil fondamental de diagnostic et d’orientation des actions à entreprendre. Parallèlement, l’augmentation des obligations légales et réglementaires génère un volume croissant de contentieux spécifiques. Entre obligations nouvelles pour les propriétaires et gestionnaires d’immeubles, sanctions en cas de non-conformité, et multiplication des recours judiciaires, le paysage juridique de l’énergie se complexifie. Cet écosystème normatif en pleine évolution soulève des questions juridiques inédites touchant tant au droit privé qu’au droit public, aux contrats énergétiques qu’aux responsabilités des différents acteurs de la chaîne énergétique.
Cadre juridique de l’audit énergétique en France
Le cadre normatif encadrant l’audit énergétique en France résulte d’une stratification progressive de textes nationaux et européens. La directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique constitue le socle fondamental, transposée en droit français par la loi n°2013-619 du 16 juillet 2013. Cette architecture juridique s’est considérablement renforcée avec la loi Climat et Résilience du 22 août 2021, qui a étendu l’obligation d’audit énergétique à de nouvelles catégories de biens immobiliers.
Pour les bâtiments résidentiels, le décret n°2018-416 du 30 mai 2018 a précisé les conditions de réalisation de l’audit énergétique, rendu obligatoire pour les copropriétés de plus de 50 lots à usage principal d’habitation. Depuis le 1er avril 2023, cette obligation s’étend aux logements classés F ou G (qualifiés de « passoires thermiques ») mis en vente. Un calendrier progressif prévoit l’extension aux logements classés E à partir de 2025, puis D à partir de 2034.
Qualification des auditeurs et méthodologie imposée
Le législateur a défini précisément les conditions de qualification des professionnels habilités à réaliser ces audits. L’arrêté du 4 mai 2022 précise que seuls les professionnels disposant d’une certification spécifique peuvent réaliser des audits énergétiques réglementaires. Cette certification est délivrée par des organismes accrédités par le COFRAC (Comité français d’accréditation).
La méthodologie de l’audit est strictement encadrée par l’arrêté du 17 novembre 2020, modifié par l’arrêté du 4 mai 2022, qui impose un protocole en plusieurs phases:
- Une visite sur site avec relevé des caractéristiques du bâti et des équipements
- Une analyse des consommations réelles sur les trois dernières années
- Une modélisation thermique du bâtiment
- Une proposition de scénarios de travaux avec estimation des coûts et des économies d’énergie
Le contenu du rapport d’audit doit comporter des éléments précis définis réglementairement, notamment une estimation chiffrée des économies d’énergie potentielles, une évaluation du confort thermique actuel et projeté, ainsi qu’une hiérarchisation des travaux recommandés.
Cette réglementation stricte vise à garantir la qualité et la fiabilité des audits énergétiques, mais génère parfois des difficultés d’application pratique. La Cour de cassation a rendu plusieurs arrêts sur la validité des audits, notamment dans son arrêt du 24 septembre 2020 (n°19-17.068), où elle précise que l’audit énergétique doit être suffisamment précis et explicite pour constituer une base fiable de décision.
Obligations légales et réglementaires liées à la performance énergétique
Le corpus juridique français impose désormais une série d’obligations concernant la performance énergétique des bâtiments, avec des conséquences significatives sur le marché immobilier et les relations contractuelles entre propriétaires, locataires et professionnels du secteur.
Le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) et ses implications juridiques
Le DPE, réformé en profondeur par le décret n°2020-1609 du 17 décembre 2020, est devenu un document à valeur juridique contraignante depuis le 1er juillet 2021. Cette évolution transforme ce qui n’était auparavant qu’un document informatif en une pièce opposable susceptible d’engager la responsabilité du diagnostiqueur et d’affecter la validité des transactions immobilières.
La jurisprudence s’est considérablement développée autour du DPE. Dans son arrêt du 8 octobre 2021 (n°20-18.731), la Cour de cassation a reconnu qu’un DPE erroné pouvait constituer un vice du consentement justifiant l’annulation de la vente. Cette décision marque un tournant dans l’appréhension juridique de ce document.
Le calendrier d’interdiction de location des logements énergivores constitue une autre innovation majeure. En application de la loi Climat et Résilience, les logements classés G+ (consommation supérieure à 450 kWh/m²/an) ne peuvent plus être proposés à la location depuis le 1er janvier 2023. Cette interdiction s’étendra progressivement à l’ensemble des logements classés G en 2025, puis F en 2028 et E en 2034.
- 2023 : Interdiction de louer les logements G+ (>450 kWh/m²/an)
- 2025 : Extension à tous les logements classés G
- 2028 : Extension aux logements classés F
- 2034 : Extension aux logements classés E
Ces restrictions génèrent un contentieux spécifique entre bailleurs et locataires. Le Tribunal judiciaire de Paris, dans une décision du 13 avril 2022, a reconnu le droit d’un locataire à exiger des travaux de rénovation énergétique dans un logement classé F, considérant que le bailleur manquait à son obligation de délivrer un logement décent.
Obligations spécifiques pour les bâtiments tertiaires
Le secteur tertiaire est soumis au dispositif Éco Énergie Tertiaire, instauré par le décret n°2019-771 du 23 juillet 2019, dit « décret tertiaire ». Ce texte impose aux propriétaires et exploitants de bâtiments à usage tertiaire de plus de 1000 m² une obligation de résultat en termes de réduction des consommations énergétiques:
Les objectifs de réduction sont fixés à -40% en 2030, -50% en 2040 et -60% en 2050 par rapport à une année de référence qui ne peut être antérieure à 2010. La plateforme OPERAT, gérée par l’ADEME, centralise les déclarations annuelles obligatoires de consommation énergétique.
Le non-respect de ces obligations expose les contrevenants à des sanctions administratives pouvant aller jusqu’à 1500 € pour les personnes physiques et 7500 € pour les personnes morales, avec possibilité de publication des décisions de sanction (« name and shame »). Cette dimension punitive commence à générer un contentieux administratif spécifique, comme l’illustre le recours formé devant le Conseil d’État par plusieurs organisations professionnelles contestant certaines modalités d’application du dispositif (décision n°449.690 du 27 janvier 2022).
Responsabilités et litiges liés aux audits énergétiques
La multiplication des obligations d’audit énergétique génère un écosystème contentieux spécifique, mettant en jeu la responsabilité des différents acteurs impliqués dans la chaîne de l’efficacité énergétique.
Responsabilité des auditeurs énergétiques
La responsabilité civile professionnelle des auditeurs énergétiques peut être engagée sur plusieurs fondements juridiques. En premier lieu, leur responsabilité contractuelle peut être recherchée en cas de manquement à leurs obligations professionnelles. L’arrêt de la Cour d’appel de Lyon du 18 mars 2021 (n°19/08452) a ainsi condamné un auditeur énergétique pour avoir sous-estimé gravement le coût des travaux de rénovation recommandés, considérant qu’il avait manqué à son obligation de conseil.
La jurisprudence tend à considérer que l’auditeur énergétique est tenu à une obligation de moyens renforcée, impliquant une exigence particulière de rigueur et de compétence technique. Dans certaines circonstances, cette obligation peut se rapprocher d’une obligation de résultat, notamment concernant la fiabilité des calculs et simulations énergétiques.
Le défaut d’assurance constitue un autre motif fréquent de mise en cause. L’article L. 271-6 du Code de la construction et de l’habitation impose aux professionnels réalisant des audits énergétiques de justifier d’une assurance couvrant leur responsabilité professionnelle. L’absence d’une telle assurance peut entraîner des sanctions pénales et l’invalidation des audits réalisés.
Contentieux liés aux transactions immobilières
La valeur juridique renforcée des documents de performance énergétique a considérablement accru leur impact sur les transactions immobilières. Les tribunaux judiciaires sont de plus en plus saisis d’actions en nullité de vente ou en réduction du prix fondées sur des erreurs ou omissions dans les audits énergétiques ou DPE.
Dans un arrêt remarqué du 15 septembre 2021 (n°20-17.804), la Cour de cassation a validé l’annulation d’une vente immobilière en raison d’un DPE erroné ayant conduit l’acquéreur à une erreur substantielle sur les qualités essentielles du bien. Cette jurisprudence tend à s’étendre aux audits énergétiques, désormais considérés comme des éléments déterminants du consentement des parties.
Les contentieux concernent également les baux d’habitation, où la performance énergétique devient un élément de la décence du logement. Le décret n°2021-19 du 11 janvier 2021 a intégré un seuil maximal de consommation d’énergie finale parmi les critères de décence, ouvrant la voie à des actions en justice fondées sur la non-conformité énergétique du logement loué.
Les contentieux locatifs se multiplient, avec des décisions accordant aux locataires des réductions de loyer ou autorisant la réalisation de travaux aux frais du bailleur. Le Tribunal judiciaire de Nanterre, dans une ordonnance de référé du 24 février 2022, a ainsi ordonné à un bailleur de réaliser des travaux d’isolation thermique sous astreinte, considérant que le logement présentant une étiquette G au DPE ne respectait pas l’obligation de délivrer un logement décent.
Sanctions administratives et pénales
Le non-respect des obligations liées aux audits énergétiques expose à des sanctions administratives prévues notamment par l’article L. 126-33 du Code de la construction et de l’habitation. Ces sanctions peuvent prendre la forme d’amendes administratives, dont le montant peut atteindre 5% du montant des travaux recommandés par l’audit en cas d’absence de réalisation de celui-ci.
Sur le plan pénal, la falsification d’un audit énergétique ou d’un DPE peut être qualifiée de faux et usage de faux, infractions punies de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende selon les articles 441-1 et suivants du Code pénal. La jurisprudence pénale dans ce domaine reste encore limitée mais tend à se développer avec la multiplication des contrôles.
Contentieux spécifiques du droit de l’énergie
Au-delà des litiges directement liés aux audits énergétiques, le droit de l’énergie génère des contentieux spécifiques touchant à divers aspects de la production, distribution et consommation d’énergie.
Contentieux des énergies renouvelables
Les projets d’installations de production d’énergies renouvelables font l’objet d’un contentieux administratif abondant. Les recours contre les autorisations administratives délivrées pour l’implantation d’éoliennes ou de parcs photovoltaïques se multiplient, soulevant des questions juridiques complexes à l’intersection du droit de l’environnement, de l’urbanisme et de l’énergie.
Le Conseil d’État a développé une jurisprudence spécifique encadrant ces contentieux. Dans sa décision du 13 juillet 2022 (n°455.464), il précise les conditions dans lesquelles l’autorité environnementale doit évaluer l’impact cumulé de plusieurs projets éoliens sur un même territoire. De même, dans son arrêt du 15 avril 2021 (n°430.500), il clarifie l’articulation entre les différentes autorisations nécessaires à l’implantation d’installations de production d’énergie renouvelable.
Les contentieux concernent également les mécanismes de soutien aux énergies renouvelables, notamment les tarifs d’achat garantis. La remise en cause rétroactive de certains tarifs photovoltaïques par le décret n°2021-1385 du 26 octobre 2021 a généré un important contentieux, avec plus de 300 recours déposés devant le Conseil d’État contestant la légalité de cette révision tarifaire.
Contentieux des contrats de fourniture d’énergie
Les relations entre fournisseurs d’énergie et consommateurs génèrent un volume croissant de litiges, notamment dans le contexte de forte volatilité des prix de l’énergie observée depuis 2021. Les contentieux portent fréquemment sur les conditions de révision des prix, la transparence des offres ou les pratiques commerciales des fournisseurs.
La Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) joue un rôle central dans la résolution de ces litiges, à travers son Comité de règlement des différends et des sanctions (CoRDiS). Ce dernier a rendu plusieurs décisions significatives, comme celle du 18 octobre 2021 sanctionnant un fournisseur pour modification unilatérale des conditions contractuelles sans respect du préavis réglementaire.
Les tribunaux judiciaires sont également saisis de litiges relatifs aux contrats de fourniture, notamment sur le fondement du droit de la consommation. Le Tribunal judiciaire de Paris, dans un jugement du 26 janvier 2022, a ainsi condamné un fournisseur d’électricité pour clauses abusives dans ses conditions générales de vente, notamment celles relatives aux modalités de résiliation.
Un contentieux spécifique se développe autour des contrats d’achat d’énergie à long terme (Power Purchase Agreements ou PPA). La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 17 mars 2022, a dû se prononcer sur l’application de la théorie de l’imprévision à un contrat d’achat d’électricité à prix fixe conclu avant la flambée des prix de l’énergie.
Contentieux de la précarité énergétique
La précarité énergétique, définie légalement par l’article 11 de la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010, génère un contentieux spécifique touchant aux droits fondamentaux des personnes vulnérables. Les litiges concernent notamment l’accès au chèque énergie, dispositif d’aide au paiement des factures énergétiques institué par l’article L. 124-1 du Code de l’énergie.
Les coupures d’électricité pour impayés font l’objet d’un encadrement juridique strict, notamment avec l’interdiction des coupures pendant la trêve hivernale (du 1er novembre au 31 mars). Le non-respect de ces dispositions peut donner lieu à des contentieux, comme l’illustre la décision du Tribunal d’instance de Puteaux du 7 décembre 2021 condamnant un fournisseur à des dommages-intérêts pour coupure illégale pendant la période de protection.
La jurisprudence européenne influence progressivement ce domaine. La Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt Hudorovič c. Slovénie du 10 mars 2020, a reconnu que l’accès aux services énergétiques de base pouvait relever du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Évolutions et perspectives juridiques dans le domaine de l’audit énergétique
Le cadre juridique de l’audit énergétique connaît une évolution constante, sous l’influence combinée des politiques publiques de transition énergétique, des innovations technologiques et de l’émergence de nouveaux enjeux juridiques.
Vers une harmonisation européenne renforcée
La Commission européenne a présenté en décembre 2021 une proposition de refonte de la directive sur la performance énergétique des bâtiments, dans le cadre du paquet « Fit for 55 ». Ce texte, actuellement en cours de négociation, prévoit un renforcement significatif des exigences en matière d’audit énergétique et l’introduction d’un passeport de rénovation énergétique harmonisé au niveau européen.
L’objectif affiché est d’atteindre un parc immobilier à émissions nulles d’ici 2050, avec des étapes intermédiaires contraignantes. La proposition prévoit notamment que tous les bâtiments neufs devront être à émissions nulles à partir de 2030, et les bâtiments publics neufs dès 2027.
Cette harmonisation européenne aura des conséquences juridiques considérables, notamment en termes d’adaptation du droit national et de développement de nouvelles normes techniques. La Cour de Justice de l’Union Européenne sera probablement appelée à préciser l’interprétation de ces nouveaux textes, comme elle l’a fait dans son arrêt du 2 juin 2022 (C-410/20) concernant l’interprétation de la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments.
Digitalisation et protection des données
L’évolution technologique des audits énergétiques, avec le développement de capteurs connectés, de compteurs intelligents et d’algorithmes d’analyse des consommations, soulève des questions juridiques inédites en matière de protection des données personnelles.
Le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) s’applique pleinement aux données de consommation énergétique, considérées comme des données personnelles lorsqu’elles permettent d’identifier, même indirectement, des personnes physiques. La Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) a publié en 2019 des recommandations spécifiques concernant le traitement des données issues des compteurs communicants.
Un contentieux spécifique se développe autour de ces questions. Le Tribunal administratif de Marseille, dans un jugement du 11 mars 2022, a ainsi annulé une délibération municipale s’opposant au déploiement des compteurs Linky, considérant que les craintes relatives à la protection des données n’étaient pas suffisamment étayées pour justifier une telle opposition.
La question de la propriété des données énergétiques constitue un autre enjeu juridique émergent. Le droit d’accès aux données de consommation est reconnu par l’article L. 124-5 du Code de l’énergie, mais les conditions d’utilisation et de valorisation de ces données restent partiellement à définir.
Financements innovants et nouveaux modèles contractuels
Le financement de la rénovation énergétique génère des innovations juridiques significatives, avec l’émergence de nouveaux modèles contractuels comme les contrats de performance énergétique (CPE) définis par l’article L. 222-1 du Code de l’énergie.
Ces contrats, par lesquels un opérateur s’engage sur un niveau de performance énergétique contre rémunération, soulèvent des questions juridiques complexes en termes de partage des risques, de garanties et de responsabilités. Le Conseil d’État, dans sa décision du 9 juin 2021 (n°448.948), a précisé les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales peuvent recourir à ces contrats sans méconnaître les règles de la commande publique.
De nouveaux instruments financiers se développent également, comme le tiers-financement prévu par l’article L. 381-1 du Code de la construction et de l’habitation, ou les obligations vertes dédiées au financement de la rénovation énergétique. Ces mécanismes innovants nécessitent un cadre juridique adapté, qui se construit progressivement à travers la législation et la jurisprudence.
L’évolution du cadre fiscal lié à la rénovation énergétique constitue un autre facteur de transformation. Les incitations fiscales comme MaPrimeRénov’ ou les certificats d’économie d’énergie (CEE) génèrent un contentieux spécifique, notamment en cas de non-respect des conditions d’éligibilité ou de fraudes. Le Conseil d’État, dans sa décision du 11 mai 2022 (n°453.121), a ainsi précisé les conditions de retrait d’un avantage fiscal lié à la rénovation énergétique en cas de manquement aux obligations déclaratives.
Défis et opportunités pour les praticiens du droit de l’énergie
L’évolution rapide du cadre juridique de l’audit énergétique et du droit de l’énergie en général place les juristes face à des défis considérables, mais ouvre également des perspectives nouvelles pour la pratique professionnelle.
Formation et spécialisation des professionnels du droit
La technicité croissante du droit de l’énergie nécessite une formation spécialisée des juristes intervenant dans ce domaine. La maîtrise des aspects techniques de la performance énergétique devient indispensable pour appréhender correctement les enjeux juridiques.
Les barreaux commencent à reconnaître des spécialisations en droit de l’énergie, tandis que les formations universitaires développent des cursus dédiés. Le droit de l’énergie s’affirme progressivement comme une discipline autonome, à l’intersection du droit de l’environnement, du droit immobilier et du droit des contrats.
Cette spécialisation s’accompagne d’un besoin accru de collaboration interdisciplinaire. Les avocats spécialisés en droit de l’énergie travaillent de plus en plus en équipe avec des ingénieurs, des thermiciens ou des experts financiers pour appréhender la complexité des dossiers.
Anticipation des risques et conseil préventif
Face à la multiplication des obligations et à l’augmentation des risques de contentieux, le rôle de conseil préventif des juristes prend une importance croissante. L’anticipation des risques juridiques liés à la performance énergétique devient un enjeu majeur pour les acteurs économiques.
Les directions juridiques des entreprises du secteur immobilier et énergétique développent des stratégies d’anticipation et de conformité (compliance) spécifiques. Les audits juridiques préalables aux transactions immobilières intègrent désormais systématiquement une analyse approfondie des aspects énergétiques.
La rédaction des clauses contractuelles relatives à la performance énergétique fait l’objet d’une attention particulière. Les garanties de performance, les conditions de révision des prix énergétiques ou les clauses de responsabilité en cas de non-atteinte des objectifs d’efficacité énergétique nécessitent une expertise juridique pointue.
Modes alternatifs de règlement des litiges
La complexité technique des litiges liés à la performance énergétique favorise le développement de modes alternatifs de règlement des différends. La médiation et l’arbitrage présentent des avantages significatifs en termes de rapidité, de confidentialité et d’expertise des tiers intervenants.
Le Médiateur national de l’énergie, autorité publique indépendante créée par la loi n°2006-1537 du 7 décembre 2006, joue un rôle croissant dans la résolution des litiges entre consommateurs et fournisseurs d’énergie. En 2021, il a traité plus de 15 000 saisines, avec un taux de résolution amiable de 60%.
Des centres d’arbitrage spécialisés commencent à se développer, proposant des procédures adaptées aux spécificités des litiges énergétiques. La Chambre Arbitrale Internationale de Paris a ainsi créé en 2020 une section dédiée aux litiges liés à la transition énergétique.
Ces évolutions témoignent d’une transformation profonde de la pratique juridique dans le domaine de l’énergie, qui nécessite adaptabilité et innovation de la part des professionnels du droit.
Au carrefour des enjeux environnementaux, économiques et sociaux, le droit de l’audit énergétique et le contentieux du droit de l’énergie constituent un domaine juridique en pleine effervescence. Les professionnels qui sauront maîtriser ces évolutions seront en mesure d’accompagner efficacement les acteurs économiques dans leur transition énergétique et de contribuer à l’émergence d’un cadre juridique adapté aux défis de demain.
